Parlez-nous de votre parcours dans le monde du tennis

J’ai fait une maîtrise en sciences du sport en Belgique. J’ai ensuite eu l’occasion de travailler pour la fédération belge, une première incursion dans le monde du tennis. J’ai été responsable des 14 ans et moins, période durant laquelle j’ai croisé le chemin de Kim Clijsters. Nous avons développé une bonne relation. J’ai continué de la suivre par la suite dans les différentes catégories de tournois: en 18 ans et moins, sur ses premiers circuits féminins 1 000 $ 25 000 $, etc. J’ai vraiment eu la chance d’être là au bon moment et je suis très humble face à ça. C’était une joueuse extraordinaire. J’étais un coach qui a contribué un petit peu à sa carrière, mais j’ai eu de la chance d’être là, de passer toutes les étapes de coach avec elle et de l’accompagner jusqu’aux finales des Grands Chelems.

J’ai également travaillé pour la fédération anglaise pendant presque 8 ans et je suis maintenant rentré en Belgique pour développer l’académie de Kim Clijsters. Au cours de mon parcours, j’ai eu l’occasion de travailler sur le terrain comme en dehors et aussi bien dans le secteur public que privé.

La rencontre avec Kim Clijsters a-t-elle sonné comme une évidence d’un parcours hors du commun?

Pas nécessairement, puisqu’au début je n’avais pas l’expérience ni le recul pour en juger. Quand elle avait 12 ans, j’avais seulement 25 ans. Je n’avais pas d’expérience moi-même pour réaliser que c’était un projet spécial avec Kim. C’est au fil des années que j’ai pris conscience qu’elle continuait à gravir l’échelle mondiale. À l’époque, je pouvais croire que c’était moi le bon coach. Aujourd’hui, je réalise que c’était Kim qui était une joueuse spéciale et que j’étais présent au bon moment.

Quelle est la principale qualité que vous avec appris à travers votre carrière?

L’expérience m’a fait prendre conscience de l’importance de l’observation. Les athlètes n’ont pas nécessairement besoin d’avoir un flux d’explications, mais ils ont besoin d’obtenir l’information essentielle au bon moment. Je parle moins maintenant et j’ai développé un plus grand sens de l’empathie auprès des joueurs afin de leur donner la bonne information au bon moment.

Comment avez-vous vu évoluer le tennis ces dernières années?

Si on remonte un peu dans l’histoire, chez les femmes, Serena et Venus imposaient leur jeu très physique. Kim Clijsters et Justine Hénin devaient trouver des solutions et se remettre en question, ce qui passait par des échanges plus longs. Entre 1994 et 2004, le nombre de frappes a augmenté de 20 %. Aujourd’hui, on est dans une situation un peu similaire avec Aryna Sabalenka et Elena Rybakina qui dominent de nouveau avec leur force et c’est par exemple l’objectif d’Iga Świątek de trouver des solutions en changeant le rythme des échanges.

Chez les hommes, c’est vraiment la puissance du service qui domine. Même si les balles sont un peu plus lourdes, le service-coup droit est l’enchaînement le plus utilisé devant le service-volée. Je crois que Sinner joue 77 % de ses services suivis d’un coup droit. Le jeu est beaucoup plus physique qu’à l’époque de Bjorg et McEnroe. Les joueurs sont mieux préparés physiquement grâce au soutien des physiothérapeutes et d’autres spécialistes. Grâce à cela, les carrières sont aussi plus longues qu’avant.

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes joueurs qui veulent progresser?

La volonté de s’améliorer est une notion clé dans la progression. Il y a 20 ans, je regardais les jeunes qui, déjà vers 8-9 ans, étaient naturellement doués et possédaient une belle technique. Aujourd’hui, je sais que ce n’est pas le plus important. Les jeunes qui, après avoir raté trois coups de suite, continuent de courir pour aller récupérer les balles, ce sont ces joueurs qui sont les plus à même d’avoir une progression, car elle est liée à la volonté et au désir. Et puis aussi, il est important de toujours y croire et de travaille fort. La performance n’est pas un sprint, c’est un marathon.

Le deuxième conseil qui fait la différence est de trouver un coach avec qui on peut avoir une relation de confiance inconditionnelle.

Quel est votre meilleur souvenir en tant qu’entraineur?

Il y en a probablement deux. Le premier est le moment où j’ai vraiment réalisé que c’était spécial avec Kim. C’était en 1999 à l’US Open, elle joue au troisième tour contre Serena Williams. Au début du match, il n’y avait personne dans les tribunes du stade Louis Armstrong. Kim était la petite belge qui allait perdre contre Serena. Dans le troisième set, Kim menait 5-3 puis a remporté seulement un point dans les 4 jeux suivants. Mais au-delà du score, les sièges du Louis Armstrong s’était remplis et les gens accourraient pour voir la nouvelle sensation belge qui tenait tête à Serena. En sortant, j’ai pris conscience que quelque chose de spécial se passait.

Et puis il y a aussi un souvenir, à la Fed Cup en 2006. Après avoir battu 3-1 la Russie, tenante du titre des deux éditions précédentes, la Belgique remporte le double en match d’exhibition avec un duo formé par… Kim et Justine Hénin. Personne ne pensait possible qu’elles jouent ensemble et finalement elles ont gagné et prouvé au monde du tennis que la passion les animait plus que leur rivalité de joueuses.

Qu’est ce qui vous passionne encore aujourd’hui dans le tennis?

Je n’ai jamais eu besoin de vacances dans ma vie. Mais d’un autre côté, je n’ai jamais vraiment travaillé. En effet, je ne considère pas le tennis comme un travail. J’aime voyager, pas dans l’incertitude des heures de matchs comme à l’époque où je suivais des joueurs, mais j’aime vraiment voyager comme le permet ce que je fais aujourd’hui. Je suis passionné par le tennis et par le fait de trouver des solutions pour aider les coachs et les joueurs.